Le principe de non-discrimination
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- La définition de la non-discrimination
La non-discrimination est le refus d'établir une différence dans le traitement de personnes, en fonction de leurs origines, de leur race, de leur sexe, de leur religion : le logement est déjà loué, l’emploi a déjà été attribué, l’entrée de l’établissement est limitée aux membres, etc.
Nous n’évoquerons ici que les situations de droit du travail (I) et de respect de la concurrence (II).
La discrimination dans le cadre des relations individuelles du travail
La formation du contrat de travail
Comme tout contrat, le contrat de travail doit, pour être valide, respecter des conditions de fond. Ces conditions de fond s'appliquent à tous les moments de la "vie du contrat" : sa formation, son exécution, enfin sa rupture. Parfois des conditions de forme sont imposées, on citera notamment un écrit obligatoire pour les contrats de travail temporaire ou encore, les informations de différentes instances à l'intérieur de l'entreprise (IRP) ou extérieures comme l'inspection du travail.
Le contrat de travail doit être individuel et parce qu’il est intuitu personnae la question de la discrimination est particulièrement présente dans ce contexte.
Le respect de toute non-discrimination va s’appuyer sur les conditions de validité du contrat et principalement celle relevant du consentement.
La loi encadre strictement le questionnaire d'embauche (art. L. 121-6 C. trav.) : Les informations demandées, sous quelque forme que ce soit, au candidat à un emploi ne peuvent avoir pour finalité que d'apprécier sa capacité à occuper l'emploi proposé ou ses aptitudes professionnelles. Ces informations doivent présenter un lien direct et nécessaire avec l'emploi proposé ou avec l'évaluation des aptitudes professionnelles.
Le candidat est tenu d'y répondre de bonne foi mais en respectant cette logique, il n’a pas à répondre à une question sur son désir et projet de mariage, enfants, etc.
Par ailleurs, le code pénal et son article 225-2, 5° « réprime le fait de subordonner une offre d’emploi à une condition fondée, notamment, sur la nationalité, les juges, après avoir soumis cette requalification à la discussion contradictoire des parties, retiennent que les intéressés ont procédé à la diffusion d’une offre d’emploi pour laquelle était exigée la présentation de la carte d’électeur du candidat, alors que le droit de vote n’est accordé qu’aux nationaux et, dans une certaine mesure, aux ressortissants de l’Union européenne et qu’ainsi ladite offre était subordonnée à une condition de nationalité, constitutive d’une discrimination prohibée » in arrêt du 20 janvier 2009 de la chambre criminelle de la Cour de Cassation.
L’exécution du contrat de travail
Dans le cadre de l’exécution du contrat de travail, toute mesure prise par l’employeur (modification des conditions de travail, d’un élément du contrat de travail, sanctions disciplinaires) peut relever d’une discrimination si les motifs ne correspondent pas à l’intérêt de l’entreprise et à des critères objectifs (impératifs économiques de l'entreprise, qualification du poste visé par la modification).
Par ailleurs, certaines personnes sont particulièrement protégées du fait de leur statut (institutions représentatives du personnel) ou de leur état (maternité notamment).
Ainsi, Les femmes bénéficient d’une protection légale contre le licenciement pendant la grossesse, le congé maternité et les quatre semaines suivant l’expiration de ce congé. Elle ne peuvent être licenciées sauf en cas de faute grave.
De même licencier un salarié handicapé au motif de son insuffisance professionnelle sans avoir au préalable envisagé un aménagement pour compenser son handicap est discriminatoire : avant de prendre cette décision, l’employeur doit prendre les « mesures appropriées » pour permettre à ce salarié d’accéder à un emploi correspondant à ses qualifications et de l’exercer.
La discrimination dans les relations entre entreprises
Le principe
Le droit de la concurrence repose sur le principe que la concurrence est non seulement licite mais aussi nécessaire et que la conquête de la clientèle est l’objet même de l’activité de l’entreprise.
Toutefois, certains comportements ne sauraient être admis.
Ainsi, une déontologie du commerce a été mise en place par la théorie de la concurrence déloyale : afin de protéger le marché contre toute pratique susceptible d’affecter l’effectivité de la concurrence, il assure une fonction de régulation.
Dans un système de liberté concurrentielle, le risque est qu’une pression soit abusivement exercée par une entreprise sur son cocontractant. Des règles de prohibition de pratiques considérées par elles-mêmes restrictives de concurrence sont ainsi édictées. À ce titre, les pratiques discriminatoires sont sanctionnées pour imposer une égalité de traitement entre les concurrents.
L’article L. 442-6 du Code de commerce vise plusieurs comportements.
Les discriminations de toute nature (en matière de prix, de délais de paiement, de conditions de vente) étaient avant 2008 sanctionnées par principe car elles étaient non justifiées par des contreparties réelles.
On entendait par absence de contreparties réelles le fait d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu. Depuis la réforme en 2008 (loi de modernisation de l’économie), les juges sanctionnent la différence de traitement si elle conduit à « soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties »
Relativement à la définition de la discrimination, la chambre commerciale l'a caractérisée (Com., 29 janvier 2008) comme étant le fait, pour une entreprise, de pratiquer ou d'obtenir, à l'égard d'un partenaire économique, des prix, des délais de paiement, des conditions de vente ou d'achat ne trouvant pas leur justification par des contreparties réelles.
L’établissement de la preuve
La difficulté de sanctionner les situations de discrimination relève largement de l’établissement de la preuve.
Aussi la cour de cassation (11 juin 2000) puis le législateur (loi n°2006-396 du 31 mars 2006) ont facilité la tâche des victimes en admettant le test de discrimination, aussi appelé « testing ». En vertu de l’article 225-3-1 du code pénal, « les délits [de discrimination] sont constitués même s’ils sont commis à l’encontre d’une ou plusieurs personnes ayant sollicité l’un des biens, actes, services ou contrats mentionnés à l’article 225-2 dans le but de démontrer l’existence du comportement discriminatoire, dès lors que la preuve de ce comportement est établie ». Les développements importants de la jurisprudence depuis 2000 ont fixé un certain nombre d’exigences de nature à garantir la valeur probante des tests. Celles-ci sont précisées par la circulaire du 26 juin 2006 du Ministère de la Justice.
Ce mode de preuve consiste à comparer le traitement réservé à des personnes « de référence » avec celui réservé à des personnes susceptibles d’être discriminées en raison de leur origine réelle ou supposée, de leur âge, de leur sexe, de leur handicap ou de tout autre critère illicite. Les tests de discrimination apparaissent donc comme un instrument utile pour mettre en évidence les inégalités et dévoiler la nature discriminatoire de certains comportements.
La technique du test est utilisée par les chercheurs comme un instrument de mesure ; elle doit dans ce cas-là respecter une méthodologie précise. Le test est aussi un instrument de vérification et de preuve en droit pénal.
Le test de discrimination, utilisé depuis 1992 par le bureau international du travail suivant la méthode « Bovenkerk » dans le domaine de l’emploi, a été repris en France par des associations engagées dans la lutte contre le racisme et les discriminations. La méthode « Bovenkerk » conclut à une situation de discrimination dès lors qu’un seuil différentiel de 15 % est atteint. Ce seuil correspond à l’écart différentiel entre les taux de refus des candidatures des deux groupes étudiés (le groupe issu d’une minorité et le groupe référent).
Pour aller plus loin...
Sites
- Le Défenseur des Droits
- La haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE) est une autorité administrative indépendante (AI) créée par la loi du 30 décembre 2004.
- Non discrimination à l'embauche
Ouvrages
Titre |
Editeur |
Auteur |
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Harcèlement et discrimination au travail |
Editions Liaisons |
V. Baudet-Caille |
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Discriminations et harcèlements au travail |
Ministère du Travail de l'Emploi de la Formation professionnelle et du Dialogue social |
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