L'épargne

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L’ÉPARGNE

Selon l’approche l’épargne peut être considérée comme la fraction du revenu non consommée ou une consommation différée, tout en remplissant une fonction économique en fournissant les capitaux nécessaires aux entreprises pour leurs investissements, elle contribue à la croissance et à la modernisation de l'outil productif.

L’épargne nationale comprend : - l’épargne des administrations publiques qui représente la différence entre les recettes et les dépenses des administrations à l’exclusion des investissements. - l’épargne des entreprises qui représente la différence entre les bénéfices et les amortissements et dividendes versés. - l’épargne des ménages L'épargne réunit les agents à capacité excédentaire de financement (les ménages) et les agents à besoins structurels de financement (les entreprises, l’Etat).

Les formes de l'épargne des ménages

Selon le degré de risque, de liquidité ou de rendement, les ménages peuvent opter pour une épargne financière et/ou une épargne non financière. L’épargne financière peut rester sous forme liquide on parle de « thésaurisation » et permet de conserver la part de revenu non consommée mais sans rémunération de l’épargne. Cette forme d’épargne peut également donner lieu à rémunération par des placements monétaires sous forme de dépôts à terme et livrets, et correspond à un besoin à court terme et de précaution. Les placements financiers par l’acquisition de titres permettent de participer au financement direct d’entreprises avec un rendement plus ou moins élevé en fonction de la prise de risque. L’épargne non financière concerne l’acquisition de biens immobiliers et répond à une volonté d’épargner à long terme.

Les motifs de l'épargne des ménages

On distingue trois motifs essentiels de l’épargne: • L'épargne d’accumulation vise à se constituer un patrimoine personnel (acquisition de biens immobiliers : ex. la résidence principale) ou à financer un projet d’entreprise. Elle répond directement au désir d’augmenter son revenu futur. Soit à long terme, notamment au moment de la retraite lorsque les revenus d’activité seront taris, soit éventuellement à plus court terme en cherchant à réaliser des plus-values spéculatives liées aux fluctuations de cours, de taux d’intérêt ou de change.

• L'épargne de précaution vise à faire face à l’incertitude du futur (retraite, dépenses de santé, avenir des enfants...) : elle tend à s’accentuer lorsque celle-ci augmente ou que la situation sociale se dégrade. Dans ce sens, l'effort d'épargne est inversement lié à l'importance du système de protection sociale en vigueur.

• L'épargne de prévoyance ou liquidité vise à disposer d’une trésorerie suffisante pour réaliser un projet ou régler des dépenses déjà programmées (vacances, bien d’équipement, acomptes d’impôts sur le revenu) ou pour financer la consommation quotidienne ou exceptionnelle entre deux intervalles de perception du revenu. Keynes considère l’épargne comme la partie du revenu qui n’est pas consommé et précise que la consommation dépend du revenu, des caractères objectifs liés au revenu (variations de revenu, anticipation de hausse de revenu, taux d’intérêt, politique fiscale) et des caractères subjectifs, ceux-ci viennent alors expliquer pourquoi l’individu ne consomme pas. « Les principaux motifs ou les principales fins de caractère subjectif pour lesquels les individus s'abstiennent de dépenser leurs revenus sont, en général, au nombre de huit : Précaution, Prévoyance, Calcul, Ambition, Indépendance, Initiative, Orgueil et Avarice » J. M. Keynes(1936), Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie (livres I à III)

La mesure de l’épargne des ménages

Du point de vue comptable, le taux national d'épargne est égal à la moyenne pondérée des taux d'épargne des différents secteurs de l’économie (ménages, entreprises, administrations publiques). Néanmoins, l’épargne des ménages est suivie avec attention compte tenu de son poids dans l’épargne nationale, et de son importance dans le financement des dépenses d’investissement permettant la croissance économique à long terme. L’épargne se mesure à partir du taux d’épargne brut qui exprime le rapport entre l’épargne des ménages et le revenu disponible brut. Le revenu disponible des ménages est constitué des revenus courant tiré de la production et des revenus de la propriété et des transferts mais dont on retranche les paiements effectués (frais financiers, impôts, cotisations sociales).

Les taux d’épargne des ménages varient considérablement d’un pays à l’autre en raison de différences d’ordre institutionnel, démographique ou encore socio-économique. Par exemple, le poids des prélèvements obligatoires sur le revenu ainsi que les politiques de redistribution des revenus pour corriger les inégalités, ou encore le régime de protection sociale et de retraite influencent la consommation et l’épargne de précaution notamment. De même, un pays avec une population âgée aura tendance à puiser dans ses réserves au détriment de l’épargne pour maintenir un niveau de consommation et faire face à des dépenses de santé notamment.

Les taux d’épargne peuvent être mesurés soit en valeur brute, soit en valeur nette en déduisant la consommation de capital fixe.

L'évolution du taux d'épargne brute Situé entre 18 et 20 % du revenu disponible dans les années 1970, le taux d’épargne des ménages a chuté pendant les années 1980 (11,10 % en 1987), pour se fixer ensuite autour de 15% en moyenne. Le taux d’épargne en 2015 des ménages est de 14,5%, qui se décompose en épargne financière avec un taux de 5,5% et épargne non financière pour 8,6 %. Le taux d’épargne ne cesse de baisser après un pic en 2009 à 16,2 %.

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EPARGNE ET PATRIMOINE

L’épargne est un flux qui vient alimenter le patrimoine, c’est à dire l’ensemble des actifs détenus par un agent économique. Le patrimoine net vient déduire les dettes de l’agent qu’il a contracté pour le constituer. Les comportements d’épargne ont ainsi une incidence sur la structure du patrimoine, selon qu’ils aient une préférence pour les actifs financiers ou les actifs non financiers par exemple. Si à l’origine le patrimoine était constitué des biens hérités, il a évolué et se caractérise par une transformation importante en actifs financiers. Début 2015, 94 % des ménages vivants en France possèdent un patrimoine, 90 % d’entre eux ont des actifs financiers alors que 63% ont des actifs non financiers, dont 58 % concernant la résidence principale. Les placements financiers peu risqués ont progressé au détriment des valeurs mobilières à la suite des crises financières et économiques. De plus, les placements privilégiés sont ceux à fiscalité avantageuse et à rémunération réglementée, tels que les contrats d’assurance-vie, les PEL.

Dans le modèle HCV de Modigliani, l’épargne est importante durant la phase d’activité pour alimenter le patrimoine qui sera ensuite ponctionné pendant la phase de retraite. En 2015, la répartition des ménages possédant un patrimoine augmente en fonction de l’âge, 9,6 % des moins de 30 ans, contre 18,9 % des 40-49 ans. Néanmoins, durant la phase de retraite le taux de détention ne baisse pas de manière importante car l’accumulation d’épargne ne suffit pas simplement à assurer la consommation de cette phase du cycle de vie mais également de constituer un patrimoine en vue de transmettre un héritage aux descendants.

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L'ANALYSE ECONOMIQUE DE LA FONCTION D'EPARGNE

• Dans la théorie classique, l’épargne est considérée comme une consommation différée et l'arbitrage entre la consommation et l’épargne est alors fonction du taux d’intérêt qui rémunère alors la renonciation à la consommation immédiate.

• Dans la théorie keynésienne, les individus consomment pour satisfaire leurs besoins, l’épargne est alors un résidu soit un excès de revenu sur la consommation. L’épargne prend la forme de monnaie ou de titres, et l’arbitrage se fera par le taux d’intérêt. C’est bien l’importance du revenu qui détermine la part de l’épargne, et Keynes définit cette capacité à épargner comme la propension moyenne à épargner (PMS, également appelée taux d'épargne) et la propension marginale à épargner en fonction de l’accroissement de revenu (PmS).

La fonction d’épargne se déduit par soustraction de la fonction de consommation, il en résulte que la somme des propensions marginales à consommer et à épargner et la somme des propensions moyennes sont toutes deux égales à 1, puisque le revenu n’offre que deux possibilités : consommer ou épargner. La propension marginale à épargner est donc positive et constante, tandis que la propension moyenne à épargner est positive et croissante avec le revenu. Il en résulte qu’en cas de revenu égal à 0, l’épargne est négative pour financer la consommation incompressible.

• Dans la théorie HCV de Modigliani ou l’approche du revenu permanent de Friedman, l’épargne est liée au revenu mais sur plusieurs années. L’épargne est importante dans le sens où elle va permettre de lisser les revenus nécessaires à la consommation mais elle reste néanmoins un résidu et non un choix volontaire.

LES DETERMINANTS DES CHOIX D’EPARGNE

Incidence du taux d’intérêt sur le comportement d’épargne

L’épargne lorsqu’elle assimilée à une consommation retardée indique à l’agent économique qu’il fait un sacrifice d’une consommation immédiate. Ainsi, en tant qu’homo economicus ayant un comportement maximisateur, il souhaite obtenir davantage plus tard qu’aujourd’hui, et le taux d’intérêt va alors rémunérer le sacrifice de la consommation présente, soit le temps qui passe entre les deux périodes. Le choix de se fait ainsi de manière intertemporelle et engendre alors deux effets : un effet substitution et un effet revenu en fonction du niveau du taux d’intérêt. Lorsque le taux d’intérêt augmente, l’agent aura tendance à épargner davantage pour augmenter son niveau d’épargne, et donc son revenu futur, il y a donc ici un effet de substitution de l’épargne à la consommation. Néanmoins, avec cette même augmentation du taux d’intérêt, l’agent rationnel pourra estimer qu’il peut épargner une somme moindre puisqu’elle sera mieux rémunérée, sachant qu’il souhaite le même niveau de revenu à la période suivante, il y a donc un effet revenu. Pour les néoclassiques l’effet substitution prime sur l’effet revenu, et une augmentation du taux d’intérêt engendre une augmentation du niveau d’épargne. Pour Keynes le taux d'intérêt ne détermine pas le partage du revenu entre consommation et épargne, mais seulement le partage de l'épargne entre monnaie et titres. Il n’aurait alors pas d’incidence sur le niveau d’épargne mais seulement sur la structure de celle-ci. Incidence de la politique fiscale sur le comportement d’épargne La politique fiscale est différente selon que la taxation concerne le revenu du travail ou le revenu du capital. Elle a d’abord des répercussions sur le revenu de l’agent qui va ainsi diminuer en fonction des taux d’imposition (que ce soit des impôts directs ou indirects) mais augmenter en fonction des crédits d’impôts et exonérations. De plus, si l’on considère l’hypothèse des comportements rationnels des agents économiques, l’épargne peut être motivée par le rendement net après impôt. La politique fiscale jouerait un rôle sur la structure de l’épargne. Enfin, la politique fiscale influence le comportement d’épargne selon le modèle HCV et la manière de transmettre l’héritage aux descendants.

Incidence de l’inflation sur le comportement d’épargne

Le lien entre l’inflation et l’épargne a été mis en évidence par A. Pigou à travers l’effet d’encaisses réelles. L’agent économique souhaite un niveau donné d’encaisses liquides exprimé en termes réels, et du fait de l’inflation il modifie son comportement d’épargne afin de maintenir la valeur fixée. L’agent accentue alors son effort d’épargne afin de compenser l’effet inflationniste du pouvoir d’achat de sa consommation future. Néanmoins, l’anticipation de prix à la consommation plus élevés peut inversement réduire l’épargne au profit de la consommation immédiate.


POUR ALLER PLUS LOIN

Les revenus et le patrimoine des ménages - Insee Références - Édition 2016

http://www.insee.fr/fr/publications-et-services/sommaire.asp?reg_id=0&ref_id=REVPMEN16

L'épargne vice ou vertu ? Problèmes économiques N°3087 - Première quinzaine 04.2014

http://www.ladocumentationfrancaise.fr/ouvrages/3303332030873-l-epargne-vice-ou-vertu

Rapport de l’Observatoire de l’épargne réglementée 2015

https://www.banque-france.fr/publications/publications/observatoire-de-lepargne-reglementee.html


BIBLIOGRAPHIE

Titre Éditeur Auteur Année
Macroéconomie, consommation et épargne Repère – La découverte P. Villieu 2008
Les 100 mots de l’épargne PUF G. Beckerman, F. de Witt 2010