Les revenus
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La notion de revenu :
J.R Hicks « Le revenu d’une personne ou d’une collectivité durant une période est égal à la valeur de ce qu’elle peut consommer au maximum durant cette période tout en restant aussi riche à la fin de la période qu’elle ne l’était au début ». Cette définition distingue ainsi le revenu en tant que flux, du patrimoine en tant que stock. Le revenu se mesure le plus souvent en argent, mais il peut également être en nature : véhicule ou logement de fonction, légumes du jardin, ou encore la mise à disposition de médicaments dans le cadre de la couverture maladie universelle.
Cette notion de revenu est importante en économie et en gestion à plusieurs titres : • En économie, les revenus sont considérés comme à la base de la consommation pour les économistes de la demande, ou comme une juste rétribution d'un travail ou d'un risque pris pour les économistes de l'offre. Ils sont également au cœur du principe des anticipations rationnelles sur les modèles inter-temporels de Friedman (revenu permanent) ou de Lucas. La notion de revenus est aussi capitale pour les théoriciens de la croissance et du développement, puisqu'elle est incluse dans les différents indicateurs permettant d'appréhender ces concepts. • Pour les juristes du travail cette notion de revenu est aussi essentielle, parce qu'elle est la contrepartie du travail réalisé, par le biais des salaires ou des revenus d'exploitation • Pour les comptables ou les fiscalistes, elle conduit au calcul des charges liées à la masse salariale, mais aussi au calcul de l'impôt sur le revenu, objet de nombreux débats actuels.
LES REVENUS PRIMAIRES DES MENAGES
Pour l'Insee, « les revenus primaires comprennent les revenus directement liés à une participation des ménages au processus de production ».
Ces revenus sont qualifiés de primaires car ils résultent de la première répartition des revenus dans une économie, celle liée à la participation des agents dans le processus de production, c'est-à-dire avant toute intervention de répartition au nom de la justice sociale.
Il faut donc absolument étudier les revenus primaires comme une résultante du partage de la valeur ajoutée et des enjeux qui y sont liés.
Les revenus du travail
Les revenus du travail sont de plusieurs types. L'essentiel des revenus du travail est constitué par les salaires versés aux salariés, mais aussi par les cotisations sociales, salariales et patronales, assises sur ces salaires. Mais sont aussi des revenus du travail les honoraires perçus par les professions libérales. Les salaires sont la plus grande partie des revenus primaires, et représentent 43 % de la valeur ajoutée en 2014, et 74% des revenus primaires.
Les revenus du patrimoine
On comptabilise comme revenus de la propriété et du patrimoine tous les revenus qui proviennent des terrains, bâtiments, mais aussi tous les revenus résultant de la détention d'actifs financiers (dividendes sur les actions par exemple, mais aussi plus simplement livrets d'épargne). Au total, en France, les revenus du patrimoine des ménages représentent 7,2% des revenus primaires en 2014.
Les revenus mixtes
Les bénéfices des entreprises individuelles, qui reviennent à leur propriétaire, sont considérés comme des revenus mixtes. En effet, ils comprennent à la fois la rémunération du travail effectué par l'entrepreneur, mais aussi son profit (et donc la rémunération des capitaux mis par lui à la disposition de son entreprise).
DU REVENU PRIMAIRE AU REVENU DISPONIBLE DES MENAGES
Les revenus primaires perçus par les ménages font l’objet de prélèvements obligatoires (impôts et cotisations sociales). Par ailleurs, ils bénéficient de revenus de transfert issus de la redistribution pour répondre aux objectifs suivants : - assurance : mise en place d’une couverture des risques (santé) - étalement dans le temps (retraites) - correction des revenus afin de lutter contre les inégalités de la répartition primaire et la pauvreté (RSA, minimum vieillesse)
Revenu primaire – Prélèvements obligatoires + Revenus de transfert = Revenu disponible
Ce revenu disponible est ensuite réparti par le ménage entre consommation et épargne. Le taux d'épargne moyen en France au quatrième trimestre 2015, est de 15,9% (Banque de France).
Ces revenus de transfert occupent une part de plus en plus importante du revenu des ménages, notamment des plus pauvres. Cela s'explique à la fois par un développement de l'Etat providence et de ses compétences et champs d'action, mais aussi par la crise ou le vieillissement des populations.
Le revenu disponible est exprimé en prix courants et ne représente pas le pouvoir d’achat du ménage, c’est-à-dire la quantité de biens et services qu’il peut acquérir compte tenu de l’évolution des prix. Il faut ainsi tenir compte de l’inflation et calculer un revenu à prix constants, soit le revenu réel, grâce à l’indice des prix à la consommation.
L’indice des prix à la consommation (IPC) est l'instrument de mesure de l'inflation. Il permet d'estimer, entre deux périodes données, la variation moyenne des prix des produits consommés par les ménages. C'est une mesure synthétique de l'évolution de prix des produits, à qualité constante. Il est publié chaque mois au Journal Officiel. L'indice des prix hors tabac sert à indexer de nombreux contrats privés, des pensions alimentaires, des rentes viagères et aussi à revaloriser le SMIC.
LES INEGALITES DES REVENUS ET LA JUSTICE SOCIALE
La mesure des inégalités est complexe et délicate. Ainsi lorsque l’on compare les revenus des ménages il faut tenir compte de la composition du ménage. Pour cela, on utilise une échelle d’équivalence (celle de l’OCDE) en mesurant la taille du ménage par unité de consommation et non par individu. Ainsi le premier adulte du ménage compte pour 1 UC, puis 0,5 UC pour les autres personnes de 14 ans ou plus et 0,3 UC pour les enfants de moins de 14 ans.
Les inégalités de revenus primaires
Ces inégalités peuvent être présentées sous plusieurs axes. Ainsi, elles peuvent concerner les patrimoines ou les salaires, et au sein des salaires, être fonction de critères géographiques, professionnels, ou encore dépendre du sexe de la personne.
Les inégalités de patrimoine
Le patrimoine détenu par les ménages comprend les biens immobiliers, les actifs financiers ainsi que le patrimoine professionnel pour les actifs indépendants.
Les inégalités salariales
Les facteurs explicatifs des inégalités sont nombreux, tels que la position hiérarchique occupée, le niveau de compétences atteint, l’ancienneté dans le poste ou encore la région de résidence. Cependant il demeure des écarts de salaire qui restent inexpliqués et relève donc de la discrimination. En 2013, à temps de travail et compétences similaires, les hommes gagnent 23,5 % de plus que les femmes, dont 11% d’écart qui reste inexpliqué et qui relève ainsi d’une pure discrimination.
L’évolution des inégalités de revenus en France
Les inégalités de revenus ont régulièrement diminué mais ont connu une inflexion ces dernières années, soit parce que les revenus des plus riches se sont envolés soit parce que les revenus des plus pauvres ont davantage baissé.
Le rapport interdécile
Pour mesurer les inégalités de revenu, on compare le rapport interdécile entre D9 et D1. Les revenus de la population sont répartis 10 groupes de 9 déciles (D1 à D9), D1 correspondant aux 10% les plus pauvres avec pour 2013 un niveau de vie inférieur à 10 730 euros et D9 aux 10% les plus riches soit pour 2013 un niveau de vie supérieur à 37 200 euros. En 2013, le rapport interdécile s’établi à 3,5 contre 4,6 dans les années 70.
L’indice de Gini
L'indice (ou coefficient) de Gini est un indicateur synthétique d'inégalités de salaires (de revenus, de niveaux de vie...). Il varie entre 0 et 1. Il est égal à 0 dans une situation d'égalité parfaite où tous les salaires, les revenus, les niveaux de vie... seraient égaux. A l'autre extrême, il est égal à 1 dans une situation la plus inégalitaire possible, celle où tous les salaires (les revenus, les niveaux de vie...) sauf un seraient nuls. Entre 0 et 1, l'inégalité est d'autant plus forte que l'indice de Gini est élevé. Il s’établit en France à 0,291 en 2013 contre 0,305 en 2012, ou 0,331 dans les années 70.
Le mécanisme de la redistribution permet de corriger ces inégalités. Pour mesurer l’efficacité de ces mesures, on compare le revenu des ménages avant et après la redistribution monétaire. Ainsi, en 2014, le rapport entre le niveau de vie moyen des 10 % de personnes les plus aisées et les 10 % de personnes les plus modestes est passé de 20 à 5,9. L’efficacité redistributive d’un transfert, c’est-à-dire sa capacité à réduire les inégalités de revenus, est fonction de deux critères : sa progressivité et son poids dans le revenu disponible global des ménages. Au niveau des prélèvements obligatoires, l’impôt sur le revenu participe à la réduction de 32 % des inégalités, grâce à son système progressif. Quant aux prestations sociales, l’aide au logement et les minima sociaux participent de manière importante à la réduction des inégalités avec respectivement 18,3 % et 18,5 %.
La justice sociale
Une société organisée selon la justice sociale se caractérise par l’égalité de ses membres : égalité devant la loi, égalité des chances, égalité des situations. La justice sociale est donc une construction morale et politique reposant sur une série de choix collectifs et déterminant les solidarités collectives concrètes appliquées par la politique de l'État. Aristote distingue la justice commutative qui correspond à l’égalité arithmétique entre les individus égaux, de l’égalité distributive qui correspond à une égalité proportionnelle (rémunération en fonction des efforts ou mérites), avec toute la difficulté d’évaluer cette proportion. Le mécanisme de la redistribution vise ainsi à corriger les inégalités de revenus et rétablir une justice sociale, selon le cas par une justice commutative (
Le mirage de la justice sociale
La justice sociale, notamment en matière de revenus fait l’objet de contestation. Selon F.Hayek la justice sociale est un « mirage », dépourvue de sens car la répartition n’est pas le résultat d’une volonté consciente mais du système de marché.
POUR ALLER PLUS LOIN ...
Sites
Ouvrages
Titre | Éditeur | Auteur | Année |
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L'économie des inégalités - Repères 216 | La Découverte | Thomas Piketty | 2015 |
Les hauts revenus en France au XXème siècle, Inégalités et redistributions, 1901-1998 | Grasset | Thomas Piketty | 2014 |
Les revenus et patrimoine des ménages | INSEE | Collectif | 2014 |